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  • De l’utilisation avisée des « big data » issus de la santé connectée

  • Si l’ouverture des données nationales de santé (prévue dans le projet actuel de loi de Santé) n’est toujours pas effective, les données issues de la santé connectée suscitent, quant à elles, de grands espoirs. Évaluer ses performances, suivre au quotidien les données sur son état de santé, déceler les anomalies et les corriger, voilà qui intéresse en effet bon nombre d’acteurs, à commencer par la recherche en santé publique ou l’industrie pharmaceutique, qui pourraient ainsi améliorer facilement leurs études en épidémiologie, en pharmacovigilance, l’évaluation de la faisabilité des études cliniques ou leurs rapports médico-économiques. Les assurances et mutuelles ne sont pas en reste : un accès à ces précieuses informations leur permettrait de mieux percevoir l’état de santé de leurs clients et adapter la tarification de leurs cotisations en fonction du comportement de l’assuré. On l’aura compris, les données de la santé connectée sont donc une mine d’informations alternatives dont l’utilisation, à des fins purement commerciales, suscite des débats. Des instances telles que la CNIL n’hésitent d’ailleurs pas à mettre les usagers en garde contre la valorisation des données à des fins de marketing ciblé. Par sécurité, ces données doivent donc être « anonymisées » et hébergées dans des structures agréées. Dès lors les données et leur monétisation sont une question essentielle, concrètement au cœur du modèle économique de la santé connectée. L’un de ces modèles économiques est même la monétisation de la donnée vers l’utilisateur lui-même. Sur certaines applications, le modèle « freemium » offre un abonnement gratuit mais avec accès restreint à ses propres données. Si l’on est prêt à payer, on peut se comparer avec d’autres abonnés et bénéficier de services élargis.

     

    Partager les données de la santé connectée

    Largement partagée, la santé connectée pourrait permettre un suivi encore plus personnalisé. On pourrait ainsi imaginer se rendre à une consultation médicale et que notre médecin ait déjà visualisé toutes les données concernant notre activité physique, notre sommeil, notre pression artérielle et autres paramètres : la consultation serait alors plus vite orientée vers le traitement adapté. Dans cette optique, le potentiel des données révélées par la santé connectée paraît énorme, prometteur de remèdes d’avenir. Beaucoup de médecins, à l’image du Pr John Newton de Public Health England, souhaitent ainsi mettre ces données le plus rapidement possible dans les mains des praticiens. Mais, attention, la démarche n’est pas simple : la masse de données, présentée telle qu’elle l’est aujourd’hui, semble en effet immense et ingérable par les professionnels de santé. Pour gérer ces « big data », les big techs misent ainsi sur des systèmes d’intelligence artificielle, tels que Watson d’IBM : cette technologie est déjà utilisée dans plusieurs centres hospitaliers aux États-Unis, notamment en oncologie, et a pour but d’améliorer le diagnostic et de suggérer les traitements les plus appropriés. Pour exemple : la biologie moléculaire et la génomique vont produire des milliards de données, que seuls des systèmes experts tels que Watson pourront analyser et recroiser pour générer de nouvelles avancées médicales. Le Dr Laurent Alexandre, chirurgien-urologue et neurobiologiste, fondateur de Doctissimo.fr et directeur de DNAVision, parle ainsi de « watsonisation » de la santé.

    Mais si ce partage de données fait débat, le succès de la santé connectée, lui, va grandissant. Aux États-Unis, les hôpitaux testent leurs solutions de santé connectée sur leurs patients, avec des conclusions très positives, comme en témoignent les résultats préliminaires de deux programmes de recherche clinique du Center for Connected Health de Partners Healthcare, basé à Boston. Une équipe de médecins de ce même centre a par ailleurs créé un groupe privé sur Facebook réservé aux adolescents asthmatiques. Ils se sont ainsi aperçu que ces jeunes adhéraient quatre fois plus au questionnaire de contrôle que les autres jeunes asthmatiques, et que leur asthme s’améliorait considérablement par rapport à l’utilisation d’un nouvel inhalateur. Une autre étude en cours s’est également penchée sur des patients diabétiques de type 2, équipés d’un traqueur d’activité. Ces patients reçoivent ainsi des messages automatiques de motivation, en fonction de leur comportement et de leurs déclarations. Selon les résultats préliminaires, ces messages provoqueraient une baisse de l’hémoglobine glyquée, marqueur du diabète et sembleraient même plus efficaces que la metformine, médicament prescrit pour ce type de diabète. Des conclusions qui ne laissent aucun doute sur le fait que la santé connectée est en passe de révolutionner la prise en charge médicale et qu’il faudra donc prendre largement en compte l’importance de la diffusion/protection de ces données.

    Ariane Langlois

     

     

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